Un jour, un mythe - Le mythe de Pandore

Texte :

Chaque jour, un nouveau mythe à dévorer dans votre calendrier de l'avent mythologique ! Retrouvez-les tous dans la Bibliothèque mythologique idéale ! Par Laure de Chantal

C’est que les dieux ont caché ce qui fait vivre les hommes ; sinon, sans effort, tu travaillerais un jour, pour récolter de quoi vivre toute une année sans rien faire ; vite, au-dessus de la fumée, tu pendrais le gouvernail, et c’en serait fini du travail des bœufs et des mules patientes. Mais Zeus t’a caché ta vie, le jour où, l’âme en courroux, il se vit dupé par Prométhée aux pensers fourbes. De ce jour aux hommes il prépara de tristes soucis. Il leur cacha le feu. Mais ce fut encore le brave fils de Japet qui alors, pour les hommes, le vola au sage Zeus, dans le creux d’une férule, et trompa l’œil du dieu qui lance la foudre.
Et, courroucé, Zeus qui assemble les nuées lui dit : « Fils de Japet, qui en sais plus que tous les autres, tu ris d’avoir volé le feu et trompé mon âme, pour ton plus grand malheur, à toi, comme aux hommes à naître : moi, en place du feu, je leur ferai présent d’un mal, en qui tous, au fond du cœur, se complairont à entourer d’amour leur propre malheur. »
Il dit et éclate de rire, le père des dieux et des hommes ; et il commande à l’illustre Héphaïstos de tremper d’eau un peu de terre sans tarder, d’y mettre la voix et les forces d’un être humain et d’en former, à l’image des déesses immortelles, un beau corps aimable de vierge ; Athéné lui apprendra ses travaux, le métier qui tisse mille couleurs ; Aphrodite d’or sur son front répandra la grâce, le douloureux désir, les soucis qui brisent les membres, tandis qu’un esprit impudent, un cœur artificieux seront, sur l’ordre de Zeus, mis en elle par Hermès, le Messager, tueur d’Argos.
Il dit, et tous obéissent au seigneur Zeus, fils de Cronos. En hâte, l’illustre Boiteux modèle dans la terre la forme d’une chaste vierge, selon le vouloir du Cronide. La déesse aux yeux pers, Athéné, la pare et lui noue sa ceinture. Autour de son cou les Grâces divines, l’auguste Persuasion mettent des colliers d’or ; tout autour d’elle les Heures aux beaux cheveux disposent en guirlandes des fleurs printanières. Pallas Athéné ajuste sur son corps toute sa parure. Et, dans son sein, le Messager, tueur d’Argos, crée mensonges, mots trompeurs, cœur artificieux, ainsi que le veut Zeus aux lourds grondements.
Puis, héraut des dieux, il met en elle la parole et à cette femme il donne le nom de « Pandore », parce que ce sont tous les habitants de l’Olympe qui, avec ce présent, font présent du malheur aux hommes qui mangent le pain. Son piège ainsi creusé, aux bords abrupts et sans issue, le Père des dieux dépêche à Épiméthée, avec le présent des dieux, l’illustre Tueur d’Argos, rapide messager. Épiméthée ne songe point à ce que lui a dit Prométhée : que jamais il n’accepte un présent de Zeus Olympien, mais le renvoie à qui l’envoie, s’il veut épargner un malheur aux mortels. Il accepte et, quand il subit son malheur, comprend.
La race humaine vivait auparavant sur la terre à l’écart et à l’abri des peines, de la dure fatigue, des maladies douloureuses, qui apportent le trépas aux hommes. Car les hommes vieillissent vite dans la misère. Mais la femme, enlevant de ses mains le large couvercle de la jarre, les dispersa par le monde et prépara aux hommes de tristes soucis. Seul, l’Espoir restait là, à l’intérieur de son infrangible prison, sans passer les lèvres de la jarre, et ne s’envola pas au-dehors, car Pandore déjà avait replacé le couvercle, par le vouloir de Zeus, assembleur de nuées, qui porte l’égide. Mais des tristesses en revanche errent innombrables au milieu des hommes : la terre est pleine de maux, la mer en est pleine ! Les maladies, les unes de jour, les autres de nuit, à leur guise, visitent les hommes, apportant la souffrance aux mortels – en silence, car le sage Zeus leur a refusé la parole. Ainsi donc il n’est nul moyen d’échapper aux desseins de Zeus.

Hésiode, Les Travaux et les Jours, v. 42 et suiv.

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